«Je me transformerai volontiers en un pont de pierre et supporterai 500 ans de vent, 500 ans d’ensoleillement et 500 ans de pluie, si seulement elle marchait sur le pont.»
Reign of Assassins est réalisé par Su Chao-Bin en 2010. Le grand maître des films d’action, John Woo, était l’un des nombreux producteurs du film. Il met en vedette Michelle Yeoh, Kelly Lin et Jung Woo-sung, Guo Xiaodong, dans les rôles principaux.
Comme dans tout bon wirefu, tout commence avec une légende. Quiconque détiendrait les restes momifiés d’un moine obtiendrait le pouvoir de contrôler le monde des arts martiaux. Bodhi était ce moine bouddhiste indien, ayant immigré en Chine il y a 800 ans. Un as des arts martiaux, il avait atteint la transcendance spirituelle et physique.
Un film de près de deux heures abordant plusieurs thèmes que j’adore dans mes drames: complot, meurtre, misogynie/émancipation, hypocrisie. Il y a aussi les thèmes retrouvés habituellement dans les wire fu: trahison, vengeance, usurpation de pouvoir, transcendance du corps et de l’esprit, rédemption. Dans Reign of Assassins, le réalisateur a décidé d’ajouter la romance. Pas en trame de fond, mais franchement, en avant-plan. Ou côte-à-côte avec le mystère des restes momifiés du moine que tous les maîtres du monde des arts martiaux recherchent.
Suite à plusieurs batailles, le cadavre fut coupé en deux. Un groupe d’assassins, le Dark Stone, réussit à trouver le torse. Pour y parvenir, ils assassinèrent un ministre et son fils, Renfeng (Guo Xiaodong). Dans la mêlée, le groupe est trahi par l’assassin Xi Yu (Kelly Lin) qui s’enfuit avec les restes.
Elle rencontre un moine en préparation, Wisdom (Calvin Li), dont elle tombe amoureuse. Ils resteront ensemble plusieurs mois à s’entraîner jusqu’au moment où il doit partir finir ses jours dans un temple bouddhiste. Pour l’en empêcher, Xi Yu menace de tuer tous les moines du temple qu’il doit rejoindre. Wisdom décide de sacrifier sa vie pour le karma de la femme, ce faisant, il lui montre les quatre failles de sa technique d’épée la plus menaçante: le water-shedding sword technique.
C’est le second film que j’ai vu qui n’avait pas peur de ce thème, le premier Wing Chun, est un classique avec pour actrice principale Michelle Yeoh, aussi. Il y a peut-être quelque chose à dire sur le fait que les rôles principaux féminins doivent avoir de la romance approfondie dans l’histoire. Alors que leurs comparses masculins n’ont pour romance que la jeune ingénue qu’ils doivent sauver d’un monstre. Il me faudrait voir un plus large éventail de films d’arts martiaux où la femme est le personnage principal pour juger.
Bref, Xi Yu réalise les derniers souhaits de Widsom. Elle enterre les restes du moine Bodhi au temple où il devait finir ses jours. Pour ensuite changer de vie, drastiquement. Le docteur Li (Chin Shih-Chieh) change chirurgicalement son visage; elle réapparaît sous les traits de Zeng Jing (Michelle Yeoh).
Zeng Jing mène une vie paisible en tant que vendeuse de tissus. Elle tombe amoureuse et épouse Jiang Ah-Sheng (Jung Woo-sung), un pauvre livreur de courrier. Leur vie calme ne dure pas longtemps; des voleurs attaquant une banque où ils se trouvent dépoussièrent les talents martiaux de Zeng Jing. Ce qui met le chef des Dark Stone sur sa trace. Le Wheel King (Wang Xueqi) rappelle sa bande éparpillée à la Capitale: le Magicien (Leo Dai), Lei Bin (Shawn Yue) et la remplaçante de Xi Yu, Turquoise (Barbie Hsu).
La suite est une série d’actions abracadabrantes qui est tout à l’honneur des films d’arts martiaux chinois. Les antagonistes ne sont pas unidimensionnels. C’est-à-dire qu’ils ont tous des motivations bien à eux. Ces motivations n’ont rien avoir avec le groupe Dark Stone, tout comme Xi Yu/Zeng Jing. Ce qui apporte une touche de mélodrame quand vient le temps de leur mort violente.
Des révélations un peu soap-opéraesques se font vers la fin du film. Jiang Ah-Sheng n’est nul autre que le fils du ministre, Renfeng. Il a lui aussi utilisé les talents du Docteur Li qui lui expliqua pourquoi il avait survécu à une rencontre avec Xi Yu qui aurait dû lui être fatal: situs inversus viscerum (position inversée des organes internes). La fabuleuse épée de l’assassine n’avait pas atteint son cœur étant situé à droite. La salle du Festival Fantasia où je me trouvais a éclaté de rire, mais je suis restée calme. J’avais déjà entendu parler de ce phénomène rare dans un manga, Team Medical Dragon. Un drôle de trope qui sera repris dans un épisode de Grey’s Anatomy et dans le film Ninja Assassin.
Après avoir immobilisé son mari, Zeng Jing affronte le Wheel King. Ce sera un cadeau d’adieu pour celui qui cherchait à venger sa famille. Elle utilise la dernière leçon de Wisdom. La guerrière contrecarre les 4 points faibles de la technique d’arme que lui a enseigné le chef des Dark Stone. Elle l’emporte sur l’homme qui voulait utilisé les restes momifiés pour lui aussi changer de vie. Pourquoi en avait-elle le droit, mais pas lui? Zeng Jing lui expliquera que son karma est trop mauvais. Il lui sera impossible d’utiliser les talents de Bodhi pour transcender les limites de son corps d’eunuque.
Au bord du trépas, elle répète les dernières paroles de Wisdom à Jiang Ah-Sheng pour lui prouver la profondeur de son amour. «Je me transformerai volontiers en un pont de pierre et supporterai 500 ans de vent, 500 ans d’ensoleillement et 500 ans de pluie, si seulement elle marchait sur le pont.» Ces phrases ont été dites par un moine en devenir à Bouddha. Le jeune moine était tombé amoureux et Bouddha lui demanda à quel point.
Finalement, le couple se réveille mal en point, mais en vie, marche vers le soleil levant. Ils vécurent heureux et auront quelques enfants…
Bonus
J’avais tellement aimé le film et la bande sonore que j’ai créé une petite vidéo. Elle est bien sirupeuse et un peu quétaine, mais je m’assume ^.^